L’ISF, plus de 160 ans au service des jeunes et du Borinage
1851, une date peu connue à Jemappes et pourtant… Alors que la Révolution Industrielle bouleverse les modes de vie et les mentalités du Borinage, trois Frères des Ecoles Chrétiennes font leur entrée à Jemappes. Grâce à la générosité du Comte Ferdinand de Meeûs (1798-1861), gouverneur de la Société Générale, ils s’installent d’abord dans ce que les gens appellent pompeusement le « château de Jemappes » avant de déménager en 1854, place de Jéricho.
Mais que sont-ils venus faire dans une région dont l’activité est tout entière dédiée à la mine et à la sidérurgie ? Dans la droite ligne des idées du fondateur de l’Ordre, St-Jean-Baptiste de la Salle, ils souhaitaient apporter un enseignement de qualité aux enfants des ouvriers borains, plus souvent occupés dans les galeries de mines (les temps sont durs au 19èmesiècle et bien souvent, le salaire des enfants, quoique misérable, est nécessaire pour boucler le budget familial) qu’à user leur fond de culotte sur les bancs d’une école…
Rapidement, l’école prend son essor, mais cela n’est pas sans susciter quelques jalousies.
En août 1863, les Frères s’établissent sur le lieu d’implantation actuel, avenue maréchal Foch. C’est à ce moment-là qu’est choisi le nom de l’Institut : St-Ferdinand saint-patron du généreux fondateur.
Cette nouvelle implantation implique de nombreux travaux pour transformer les bâtiments existants en classes, mais aussi pour construire de nouveaux locaux (réfectoires, salle des fêtes, infirmerie, dortoirs, chapelle…). Dans le même temps, l’Institut ouvre un pensionnat, mais alors que le succès des « classes gratuites » ne se dément pas, l’internat n’attire guère et est fermé. C’est reculer pour mieux sauter et tirant les leçons de ce demi-échec, il est rouvert en 1894, rencontrant alors un vif succès. Ce pensionnat permet à l’Institut d’ouvrir des classes d’enseignement secondaire et l’accroissement du nombre d’élèves, tant internes qu’externes, nécessite alors de nouveaux bâtiments. St-Ferdinand entrait dans le 20èmesiècle avec de nouveaux travaux.
L’Institut St-Ferdinand jouit alors d’une belle prospérité et sa renommée couvre le pays tout entier, au point que de nombreux jeunes flamands viennent y parfaire leur instruction et surtout, y apprendre le Français.
Les deux guerres mondiales constitueront des épreuves majeurs tant pour l’Institut que pour ses élèves, ses professeurs et ses anciens. Et à plusieurs reprises les locaux de l’ISF seront réquisitionnés à des fins militaires ou pour être transformé en hôpital (mais les cours se poursuivront dans des écoles voisines).
L’entre-deux guerres vit de nouveaux travaux embellir et agrandir l’Institut (façade, chapelle, nouvelle aile…). C’est de cette époque que date la statue colossale de St-Ferdinand, œuvre de l’artiste Boulmant.
L’immédiat après-guerre vit l’ISF continuer à croître et embellir : création d’une cour de 2500 m², mise sur pieds d’une fanfare, la Garde Saint-Ferdinand qui s’illustra jusqu’à Luxembourg, Paris et à Rome !…
Mais l’Institut ne comptait pas s’arrêter en si bon chemin et après avoir fêté avec faste son centenaire en 1951, les travaux se poursuivaient par l’adjonction de nouvelles classes et surtout, en 1960, la construction d’une salle à la fois de spectacles et de cinéma : le RINAKONO.
Les années 60 et 70 virent également le remplacement progressif des Frères par des professeurs laïcs, évolution que connurent toutes les écoles catholiques du Royaume et qui connut son point culminant avec l’arrivée de M. Daniel Bouillon à la tête de l’Institut en 1980.
Bien d’autres événements rythmèrent cette époque :
– en 1970, la bibliothèque de l’école devient bibliothèque publique ; elle a aujourd’hui (1997) rejoint ses nouveaux locaux dans l’ancienne maison communale,
– 1971 vit l’inauguration de la salle omnisports,
– 1972 amena, suite au développement des moyens de communication, la fermeture de l’Internat mais fut également l’année de l’épopée de l’ISF lors de l’émission « A vos marques » de la RTBF où l’équipe n’échoua qu’en finale,
– 1974 fut l’année de la disparition du parc pour le remplacer par des terrains de football et de basket-ball,
– 1976 : 125 ans déjà que les Frères se dévouent à Jemappes pour aider les jeunes à acquérir une éducation de qualité,
– 1980 : nouveau bouleversement, l’enseignement traditionnel est balayé pour laisser la place au Rénové, tandis que la mixité introduit des couleurs vives dans l’établissement,
– 1982 : l’ISF absorbe l’Institut Notre-Dame,
– 1980-1999 : des années à la fois de bouleversements, mais aussi la gestion de multiples réformes, changements et vaches maigres…
– 2000-2001 : l’ISF fêta son 150ème anniversaire, un fameux bail !
Mais qu’est-il devenu, cet Institut fondé il y a 166 ans par les Frères des Ecoles Chrétiennes ? Tout d’abord, il reste fidèle à ses traditions et au message de ses fondateurs : être à la disposition des jeunes, quel que soit leur milieu social, pour leur assurer une éducation et un enseignement susceptible de les amener à être des citoyens actifs et responsables, la fidélité, la réussite de nos nombreux anciens en témoignent.
Ainsi, dans la grande tradition qui amenait bon nombre de rhétoriciens présenter l’examen d’entrée à l’école des mines ou à l’école militaire, chaque année voit quelques élèves se présenter à l’examen des facultés polytechniques… Mais l’Institut, s’il reste fidèle à ses traditions évolue aussi avec son temps. Très tôt, ses responsables se sont préoccupés d’introduire l’informatique à l’école, d’ouvrir l’école et d’éveiller les élèves à la culture en leur proposant de nombreuses activités scolaires, extra-scolaires et/ou para-scolaires (découverte des pays européens, des grandes villes européennes, échanges linguistiques…).
En fait la place nous manque, mais après avoir soufflé ses 150 bougies, l’ISF peut à la fois porter un regard serein sur son passé et regarder l’avenir avec espoir, plein d’un enthousiasme juvénile jamais démenti, bref, un alerte cent-cinquantenaire[1] !
Philippe Schoore
Professeur d’Histoire
Responsable des Archives
[1] Si vous voulez en savoir plus, des exemplaires du livre : « Saint-Ferdinand – Jemappes – 1851-2001, 150 ans au service des jeunes du Borinage… et d’ailleurs » restent disponibles auprès de M. Ph. Schoore, professeur d’Histoire et responsable des archives.